• Khmers rouge sang

    Déjà mis à feu et à sang par une guerre civile de 1967 à 1975, le Cambodge s’enfonce un peu plus dans l’horreur quand les Khmers rouges finissent par l’emporter sur le gouvernement officiel. Ils instaurent alors une dictature particulièrement sanglante, qui durera près de quatre ans, de 1975 à 1979.

     

     

    Plusieurs lieux de mémoire témoignent de ce passé terrible, directement responsable de la mort d’une personne sur cinq dans le pays : la prison S21 à Phnom Penh et les killing fields à proximité, le temple Samrong Knong à Batambang, ou encore la toute proche killing cave, pour ne citer que quelques exemples.

     

    torture house museum

     

    Parmi les 20 % de la population exterminés, principalement des intellectuels ou assimilés ; il semble que le simple fait de porter des lunettes ait pu constituer une preuve suffisante de votre érudition : on imagine que les opticiens n’ont pas dû avoir beaucoup de boulot ces années-là… Docteurs, infirmiers, artistes, professeurs, étudiants, etc., étaient automatiquement considérés comme des opposants à l’Angkar – ou L’Organisation, autres noms du “parti communiste du Kampuchéa” des Khmers rouges. Assez ironiquement, plusieurs hauts-dirigeants du PCK étaient eux-même profs, dont “Pol Pot” (de son vrai nom Saloth Sâr, prof d’histoire-géo-éducation civique et français) et “Douch” (Kang Kek Leu, prof de maths). Non contents d’enlever la vie aux intellectuels, les Khmers rouges abattaient leurs familles complètes, histoire de tuer le mal à la racine. Et pour trouver les autres qui se cachent encore, un peu de torture, bien sûr :

    S21 - salle de torture

     

    Mais le reste de la population ne fut pas beaucoup mieux traité. Parmi les premières mesures de la prise de pouvoir par l’Angkar, on exila tous les citadins vers des champs où ils pourraient enfin se rendre utiles, tout en étant à la fois trop occupés et trop isolés pour pouvoir s’organiser. Deux garanties valant mieux qu’une, on prenait soin de bien séparer les familles. De la même façon, les habitants des campagnes étaient parfois disséminés dans des régions qui leur étaient inconnues. Pour brouiller les esprits un peu plus, on remariait les gens malgré eux, et les anciens registres d’état civil disparaissaient comme par magie…

     

     

    séparation enfants/parents

     

     

    Les Khmers rouges se rêvant seuls maîtres à bord de ce triste navire, ils anéantirent autant qu’ils le purent les traces tangibles de religion (statuaire, livres… et parfois les moines eux-mêmes) et ils abolirent la monnaie. On voit bien la logique maoïste, vouloir libérer le peuple de l’emprise des dogmes et du capitalisme, mais quand et comment a-t-on décidé de le faire en réduisant ce même peuple à l’esclavage et en le maintenant sous un régime de terreur ? La parano qui s'est emparée des dirigeants du Parti a mené à la destitution de plusieurs d'entre eux, qui finirent torturés et tués comme les autres ; pourtant, cette parano était bien prévisible, alors quelle était la visée à long terme d'un Pol Pot, d'un Nuon Chea (président de l'Assemblée), d'un Douch (directeur de la prison S21) ?

    règlement de S21

    Outre ces personnalités aussi dérangeantes que dérangées par leurs rêves de pouvoir absolu, la capacité de résilience apparente du peuple cambodgien m'interroge : comment la population n'a-t-elle pas, de 1979 à nos jours, cherché à se venger ? Bien sûr, nombre de "petites mains" du régime khmer rouge commettaient leurs exactions sous la contrainte, ce qui les allège d'une part non négligeable de responsabilité, mais ce ne serait pas la première fois qu'on verrait des descendants de victimes et des descendants de bourreaux s'entretuer. Mon guide, à Battambang semblait dire qu'en dehors des élites, on ne sait pas vraiment qui faisait quoi, à cause notamment des déplacements de population qui mettaient en présence des "officiers" et des "esclaves" qui ne se connaissaient pas. Le bouddhisme peut-il aussi en partie expliquer cette aptitude à "passer outre" ? Pas mal de questionnement, peu de réponses à vous apporter.

     

     

     

    Pour ceux qui le souhaitent, je vous laisse découvrir plus d’images et de descriptions des exactions commises par l’Organisation dans les galeries dédiées à Battambang et à Phnom Penh. Attention, quelques photos pourraient choquer les plus sensibles.

     

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  • Commentaires

    1
    Dany et CLaude
    Jeudi 27 Février 2020 à 08:59

    Si le voyage nous offre les beautés du monde, il nous envoie aussi, parfois, en pleine figure ses monstruosités. Après le Cambodge, le Vietnam... il n'y aura sûrement pas que des paysages magnifiques là-bas non plus. Bonne continuation et bises.

    2
    mijo
    Jeudi 27 Février 2020 à 10:57

    Il était bien de rappeler que les beautés du monde sont une chose apaisante

    mais que  l'histoire de ce pays comporte des horreurs insoutenables.

    que beaucoup de monde a oublié...parce que lointaines...

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